mercredi 29 décembre 2010

Chapitre 12 : Retrouvailles (Partie 1)

POV Edward

A mon réveil ce matin-là, j'avais un énorme nœud à l'estomac. J'étais stressé ! L'angoisse qui me poursuivait depuis des jours venait d'atteindre son apogée ! Aujourd'hui sonnait le glas de mon enfer personnel ! Je savais qu'épouser Tanya était une erreur monumentale et pourtant rien n'y faisait, je fonçais tête la première. J'avais l'impression que quelqu'un avait pris possession de mon corps sans que je ne puisse rien y faire. Ma raison me dictait une chose alors que mon cœur et mon âme me poussaient dans l'autre sens. Je me sentais coupé en deux. J'avais pourtant essayé de l'oublier, essayé de nier les sentiments qui m'unissaient à elle mais c'était impossible. Je l'avais dans la peau pour l'éternité. Mon cœur et mon corps réclamaient son retour.

Ces trois derniers jours avaient été les pires de ma vie. Je l'avais quittée sur cette falaise. Je me sentais tellement mal d'avoir fait ça. Je n'arrêtais pas de penser à ce qui se serait passé si j'avais essayé de la convaincre une énième fois. Peut-être aurait-elle fini par craquer ? Ne rêve pas Edward ! Elle en a épousé un autre ! Que te faut-il de plus pour être convaincu qu'elle ne veut pas de toi ?

A chaque fois que cette horrible petite voix se manifestait dans ma tête, je ne pouvais m'empêcher de la fuir en l'étouffant dans mon oreiller. Je ne voulais pas penser à cette hypothèse même si à ce jour, elle restait la plus plausible de toutes…

Le lendemain de mon retour à New York, je m'étais cloitré chez moi, ne voulant voir personne et surtout pas Tanya. Cette dernière avait essayé de m'appeler mais j'avais éteint mon portable, voulant rester seul avec moi-même et mes pensées moroses. Je ne voulais rien faire à part penser à Bella. Elle me manquait. A chaque fois que je fermais les yeux, c'était son visage qui se dessinait. Mes songes n'étaient remplis que de nos ébats amoureux. A chaque fois que je me réveillais, j'étais trempé de sueur. Chaque rêve était plus réel que le précédent. Mes doigts se souvenaient de chacune des courbes de son corps, mes lèvres se rappelaient la douceur et la tiédeur des siennes. Mes réveils n'en étaient que plus douloureux. Je me sentais comme un peintre à qui on aurait arraché son œuvre. Bella Swan avait tatoué mon cœur de manière indélébile.

Le deuxième jour, je m'étais décidé à sortir faire quelques courses. Bien que me nourrir ne soit pas ma préoccupation première, c'était une nécessité. Si cela avait pu me la ramener, nul doute que je me serais laissé dépérir. Tanya avait laissé des dizaines de messages sur mon portable. Elle me priait de ne pas oublier les derniers essayages costume. Si je n'avais pas été si lâche, il y aurait bien longtemps que je lui aurais dit d'aller se faire voir. Et pourtant, je me laissais faire comme un pantin. J'étais faible. Pourquoi m'entêter dans cette union qui nous conduira de toute façon droit dans le mur ? Allez ! Dis-le Edward ! Tu as envie de te venger ! Tu as envie qu'elle souffre de te voir en épouser une autre comme tu as souffert de la voir s'unir à un autre. La faire souffrir était pourtant la dernière chose que je souhaitais faire.

Après avoir effectué mes achats à la petite superette du coin, j'étais rentré chez moi d'un pas las et lourd. J'avais rangé le peu de courses que j'avais faites mais n'avait pas eu le courage de me cuisiner quoi que ce soit. Je m'étais alors dirigé vers mon plus fidèle ami : mon piano. Lorsque j'avais relevé le couvercle et que mes doigts s'étaient posés sur l'ivoire des touches, j'avais senti une grande bouffée de bonheur m'envahir. Voulant conserver ce moment de plénitude, j'avais laissé courir mes doigts sur le velouté de mon instrument. Instinctivement, je reconnus la mélodie que je jouais. C'était sa berceuse. Celle que j'avais composée le lendemain de notre première rencontre. Pourtant celle-ci était restée inachevée, comme notre histoire. J'avais passé des heures à chercher une fin correcte à ce morceau mais rien ne venait. Peut-être est-ce le destin qui voulait me transmettre un message ? Peut-être que cette mélodie m'incite à laisser tomber tout espoir de la conquérir ? Cependant, je refusais cette fatalité. Il était hors de question pour moi de laisser cette composition en suspens. J'avais donc joué et rejoué ce morceau pendant des heures jusqu'à ce que mes yeux se troublent de fatigue. Malgré le sommeil qui me gagnait, je ne voulais pas abandonner. Abandonner signifiait la laisser partir. Et je ne voulais ça pour rien au monde.

Lorsque j'avais ouvert mes yeux le lendemain, je m'étais aperçu que je m'étais endormi sur le clavier de mon piano. Me sentant courbaturé, je m'étais étiré et avais décidé de prendre une douche. La première depuis deux jours ! J'avais ôté mon pantalon de jogging et m'était regardé dans le miroir. Je ne reconnaissais plus mon visage. Des cernes noirs avaient élu domicile sous mes yeux. Ma peau était terne et mes cheveux étaient plus désordonnés qu'à l'accoutumée. J'avais soupiré et avait tourné le robinet d'eau chaude à son maximum. Une fois que la buée avait pris possession de la pièce, j'avais tempéré avec de l'eau froide et m'était glissé sous le jet. Je laissais la chaleur de l'eau effectuer son travail sur mes muscles tendus.

J'avais fermé mes paupières et n'avait pas été surpris de voir son visage souriant derrière mes yeux clos. Les images de notre dernière nuit se rejouaient en boucle dans ma tête. Tout n'avait été que bestialité et intensité. Pourtant, à travers cet ébat sauvage, j'avais essayé de lui transmettre toute la tendresse et tout l'amour que je ressentais pour elle. Repenser à ces derniers instants m'était trop douloureux. J'avais alors posé ma main sur le carrelage froid de douche et m'était laissé aller à ma peine. L'eau qui ruisselait sur mon visage emportait avec elle chaque larme versée. J'étais resté sous cette douche jusqu'à que mon corps soit secoué de violents frissons. Je ne m'étais même pas aperçu que l'eau était devenue glacée. J'avais alors coupé le robinet et étais sorti afin de me sécher. J'avais entendu des grands coups frappés à la porte. J'avais entouré ma taille d'une serviette propre et m'était précipité à la porte de mon appartement. Quelle ne fut pas ma déception d'y trouver Tanya. S'était alors ensuivi une longue dispute entre nous.

Flashback

- Bonjour Edward

Wow ! Edward ! De la bouche de Tanya, cela sonne comme une déclaration de guerre…

- Tanya ?
- Je suis surprise de te trouver en vie. Tu ne réponds à aucun de mes appels. De plus, tu as raté les essayages de ton costume…

Merde ! Les essayages ! Je m'étais tellement concentré dans la mélodie que je composais que j'avais complètement oublié d'aller à ses foutus essayages.

- Est-ce que tu peux me dire ce qui se passe Edward ? Depuis que nous sommes rentrés, tu es… bizarre !
- Non je ne suis pas bizarre… J'ai juste… J'ai juste oublié… Excuse-moi
- Tu as oublié ? Bien sûr si tu répondais à tes appels ou écoutais tes messages, tu n'aurais pas oublié.

Je mourrais d'envie de lui dire que je les avais écoutés. Enfin, j'en avais écouté un et effacé les suivants mais je décidai de mentir.

- J'ai égaré mon portable.

Plus nulle comme excuse tu meurs !

- Ah tiens ! Tu as perdu ton portable. Alors qu'est-ce qu'il fait sur ton piano ?

Merde !

- Heu je… je…
- Alors est-ce que tu comptes me dire ce qu'il se passe ou bien est-ce que je dois jouer aux devinettes ?

Jouer les innocents ! Je haussai les épaules faisant comme si je n'avais pas compris ses allusions. Je voyais exactement où elle voulait en venir et Tanya était la dernière personne avec laquelle j'avais envie de discuter de Bella.

- Très bien ! Alors qu'est-ce qui se passe avec cette fille ? Bella c'est ça ?
- Je ne vois pas de quoi tu parles.
- Tu sais très bien de quoi je parle. Tu as couché avec elle ?

Je restai silencieux.

- Tu n'as pas besoin de me le dire, je le sais. Mon pauvre Eddy, tu es tellement transparent. Je l'ai su à la minute où j'ai rencontré cette traînée.

Je m'approchai d'elle et la plaquai contre la porte d'entrée en mettant une main sous sa gorge.

- Je t'interdis de parler d'elle de cette manière.
- Intéressant ta réaction ! Ne me dis pas que tu es amoureux d'elle.

Je la lâchai et me retournai en agrippant mes cheveux.

- Alors écoute-moi bien Edward. Je suis prête à tolérer cet… écart de conduite. Mais ne t'avise pas de me quitter.
- Et qu'est-ce que ça signifie ?
- Que je ne te laisserai pas faire comme ta mère.
- Ma mère ?

Mon air surpris la fit sourire.

- Humm… Apparemment la famille Cullen a ses petits secrets de famille. Tu devrais poser quelques questions à ta chère maman pour lui demander ce qu'il s'est passé il y a 30 ans…
- Explique-toi.
- Tu as rendez-vous dans une heure au magasin pour l'essayage de ton costume. Ne sois pas en retard.
- Tanya explique-toi tout de suite.
- Au revoir Edward

Elle tourna les talons et sortit de l'appartement sans un mot de plus. Qu'a-t-elle bien pu vouloir dire ?

Fin du Flashback

C'est donc l'esprit embrouillé que je m'étais rendu à ces foutus essayages. Qu'est ce que ma mère peut bien avoir à faire avec cette histoire ? 

Lorsque j'étais rentré du magasin, je m'étais instantanément remis à mon piano. Jouer me permettait de repenser à elle inlassablement. Et je ne voulais pas me priver de la seule chose que je pouvais m'autoriser. Dans l'après midi, j'avais vu débarquer Jasper. Je mourrais d'envie de lui demander des nouvelles de Bella. Nous avions échangé quelques banalités avant d'en venir à l'essentiel. Il essayait de me dissuader d'épouser Tanya. Je savais pourquoi je voulais aller au bout mais c'était inavouable, même à mon meilleur ami. Inconsciemment, je voulais lui faire aussi mal qu'elle m'avait fait mal en épousant Jacob. Mais serai-je vraiment capable d'aller jusqu'au bout ? 

Après une nuit agitée, j'étais parti chercher mes parents à l'aéroport. Je n'avais pas téléphoné depuis mon départ et j'ignorais totalement si Emmett viendrait avec eux. Notre dernière dispute m'avait beaucoup remué. Jamais je ne m'étais disputé avec lui. On passait notre temps à se chamailler bien sûr, mais jamais nous n'en étions venus à un tel point.

Lorsque la voix de l'hôtesse annonça l'arrivée de leur vol, je levai la tête afin de les apercevoir. Je fus soulagé d'un poids lorsque je vis la tête de mon frère parmi les passagers. Devant lui se trouvaient mes parents.
Quand ils furent à ma hauteur, je leur souris brièvement. Ma mère me serra dans ses bras et mon père ébouriffa mes cheveux. Emmett resta en retrait et ne parla pas. J'étais nerveux et triturai mes clés de voiture dans mes mains. La voix de mon père me sortit de ma léthargie.

- Bon les garçons, vous n'allez pas vous faire la tête tout le week-end ?
- Tu sais très bien que je ne voulais pas venir !
- Emmett…

Ma mère fit les gros yeux à mon frère.

- Bon très bien, je vais être souriant et faire comme si tout allait très bien.
- Il ne fallait pas venir si tu ne le voulais pas.

Ma voix avait été tranchante. Je me mis une claque mentale. Trois jours que j'étais fâché avec mon frère et voilà comment j'essayais de réparer les pots cassés.

- Crois-moi, si ça ne tenait qu'à moi, je serais déjà en train de m'acheter un billet retour.

Je soufflai d'exaspération.

- Tu ne crois pas qu'on pourrait mettre nos différends de côté pour ce week-end ?
- Ben justement, si ce week-end tu fais ce pourquoi nous sommes venus, il n'y aura plus de différends entre nous. Je te jure que pour ma part il n'y aura que de l'indifférence.
- C'est une menace ?
- Un conseil…
- Bon ça suffit ! Je refuse de voir mes deux garçons se disputer ! Alors nous allons tous mettre nos préjugés et problèmes de côté et soutenir Edward comme il en a besoin. Est-ce que c'est clair ? Emmett ?
- Oui Maman.
- Edward ?
- Oui Maman.

Nous devions tous deux avoir l'air de deux gamins pris en faute. Nous nous défiâmes du regard quelques instants. Mon père rompit notre combat visuel en me prenant le bras et en m'entraînant vers le tapis roulant afin de récupérer les bagages. Le trajet jusqu'à l'appartement se fit dans un silence plus que religieux. Jasper était parti s'installer chez notre ami Ben pour le week-end afin de laisser sa chambre à mes parents et mon frère allait occuper le canapé.

La tension qui régnait au sein de notre famille était à son comble. Ma mère s'était occupée du repas. Je remerciai intérieurement Jasper d'avoir fait le plein de courses avant de partir. Malgré le peu de repas que j'avais pris ces derniers jours, je touchai à peine à mon assiette. Emmett me regardait du coin de l'œil, moi je regardais ma mère alors que celle-ci adressait des coups d'œil inquiet à mon père, qui lui-même surveillait mon frère. Si la situation avait été différente, cela aurait presque pu être comique…

A la fin du repas, Emmett et moi nous occupâmes de débarrasser la table et de faire la vaisselle comme nous en avions l'habitude à la maison. Cette corvée avait toujours eu ses bons côtés à l'époque. Nous en profitions pour discuter et chahuter. Cette fois, la situation était différente. Je pouvais voir qu'il avait tous ses muscles tendus au maximum. Je savais qu'il m'en voulait. Je voulais essayer de lui parler mais à chaque fois que j'ouvrais la bouche, je la refermais aussitôt, ne sachant pas quoi lui dire.

- Elle va mal tu sais…

Je fus surpris que ce soit lui qui engage la conversation.

- Moi aussi je vais mal…
- Edward, je ne veux pas que tu gâches ta vie.
- Arrête de t'inquiéter, je sais ce que je fais.
- Non tu ne sais pas.

Il s'appuya au bord de l'évier et baissa la tête.

- J'ai passé ces trois derniers jours auprès de Bella. J'ai appris à connaître cette fille et… Enfin je veux dire, c'est ton double féminin. Elle est incroyable et magnifique et… elle t'aime…
- Si elle m'aimait tant que ça, tu crois qu'elle se serait mariée ?
- Son mariage était une erreur. Elle pensait que ce qu'elle faisait était le choix le plus judicieux. Elle le connait depuis toujours. Elle n'admettait pas d'effacer tant d'années sur un coup de tête. Mais elle est malheureuse… plus que tu ne l'imagines.
- Qu'essaies-tu de me dire ?
- Ecoute, j'ai fait une promesse et je ne peux rien dire mais sache que si demain tu épouses Tanya, tu la perdras à tout jamais.

Il ne me laissa pas le temps de répondre et quitta la pièce. Je restai stoïque un petit moment avec une assiette dans les mains et le torchon de l'autre. Qu'a-t-il voulu dire par là ? Et quelle promesse a-t-il faite ? A bien y réfléchir, j'avais senti que Jasper me cachait quelques chose aussi lorsqu'il était rentré. Il avait habilement évité le sujet. S'est-il passé quelque chose que j'ignore à San Francisco ? Bella a-t-elle quitté son mari ? Autant de questions auxquelles je ne trouvais aucune réponse.

- Est-ce que nous pouvons te voir une minute mon chéri ?

La voix de ma mère me sortit de ma transe. Je secouai la tête et regardai mes parents. Ma mère serrait la main de mon père. Elle avait un regard doux, cependant j'y décelai une lueur d'inquiétude. Quant à mon père, il me cachait ses yeux. J'eus soudainement très peur. Ma mère me fit un sourire encourageant. Je posai l'assiette et le torchon que j'avais dans les mains et nous nous installâmes au salon. Mes parents prirent place sur le canapé et je pris le fauteuil en face d'eux. Mon regard naviguait de l'un à l'autre. Je ne les bousculai pas et leur laissai le temps de trouver les mots. Cela semblait important et je ne voulais pas interférer dans leur réflexion. Je me demandai alors si cela n'avait pas à voir avec la révélation que Tanya m'avait faite la veille. Je me mis soudainement à angoisser, imaginant le pire comme le meilleur. La douce voix de ma mère s'éleva alors dans le silence de la pièce.

- Voilà mon chéri, tu es au courant que ton père et moi connaissons le père de Tanya ?

J'hochai la tête, incapable de prononcer un seul mot.

- J'ai rencontré Eléazar lorsque j'avais dix-huit ans. J'en suis tout de suite tombée follement amoureuse. Il était charmeur et toutes les filles lui couraient après. J'étais flattée qu'il s'intéresse à moi. Et puis, il me traitait comme une Princesse. Bien que le matériel n'avait aucune importance pour moi, à l'époque, j'étais heureuse de recevoir tous les cadeaux qu'il m'offrait.

Je déglutis. J'avais peur de la suite. J'espérais juste qu'elle n'allait pas me dire que j'étais le demi-frère de Tanya. Remarque, ça fait une bonne excuse pour casser ce mariage !

- Quelques mois après notre rencontre, il m'a demandé en mariage.

Quoi ? Alors là, je n'y comprenais plus rien ! Mon interrogation dut se lire sur mon visage car ma mère me prit la main par-dessus la table basse du salon et me fit un sourire rassurant.

- Un soir, alors que je rentrais à la maison à vélo, j'ai eu un accident de voiture. J'étais dans les nuages et je n'avais pas fait attention au Stop. Heureusement pour moi, le conducteur avait de bons réflexes de freinage.
- Et que s'est-il passé ?
- Et bien, il s'avère que ce même conducteur était interne en médecine.

Tout se mit alors en place dans ma tête. Le fameux conducteur était mon père. Ils échangèrent tous deux un regard attendrissant à l'évocation de ce souvenir. Ma mère nous avait toujours dit avoir rencontré mon père à l'hôpital mais elle ne s'était jamais étendue sur les circonstances.

- C'était papa !
- Oui mon chéri, c'était ton père… Je n'avais rien d'important et m'étais simplement fracturée la jambe. Ton père est venu me rendre visite chaque jour de ma convalescence. Nous avons beaucoup discuté et nous nous sommes découvert une multitude de points communs. J'en suis tombée immédiatement amoureuse.
- Et moi je suis tombé amoureux d'elle au moment où je l'ai vu allongée sur l'asphalte.

Je regardai mon père qui venait tout juste d'ouvrir la bouche. Mes parents échangeaient tous deux des regards amoureux. Après plus de vingt ans de mariage, ils étaient toujours aussi épanouis qu'au premier jour et je me mis à rêver d'un avenir comme le leur avec Bella.

- Et qu'est-il advenu d'Eléazar ?

Ma mère se tendit à l'évocation de son ancien amant.

- Et bien, Carlisle et moi sommes sortis ensemble quelques temps en cachette. Je ne me sentais pas d'annoncer la nouvelle à mes parents même si je savais qu'au fond, ils ne désiraient que mon bonheur. Et puis un jour, Eléazar est venu chez moi. Mes parents étaient sortis. Ce soir-là, il semblait tendu. Il m'effrayait presque. Il a alors sorti une enveloppe de sa veste. Celle-ci contenait des dizaines de clichés des rendez-vous secrets que j'avais avec ton père.
- Il t'avait faite suivre ?

Ma mère hocha la tête.

- Il m'a alors menacée. Il a dit qu'il dirait tout à mes parents et qu'il nous ferait une vie impossible à ton père et moi.
- Et qu'avez-vous fait ?
- J'ai pris les devants. J'ai tout dit à tes grands-parents. Il s'avère qu'ils ont très bien pris la chose et lorsqu'ils ont rencontré Carlisle, ils l'ont tout de suite adopté.

Cela ne m'étonnait guère de la part de mes grands-parents. Ma mère avait hérité de leur douceur, de leur bonté et de leur gentillesse. Esmée avait été très touchée par leur disparition dans un accident de voiture quelques années auparavant.

- Ensuite, je suis allée voir Eléazar et je le lui ai rendu tous ses cadeaux. Je lui ai dit que je n'étais pas une de ses vulgaires entreprises et qu'il ne pouvait pas m'acheter avec son argent.
- Et que s'est-il passé ensuite ?
- Et bien, il a tenu parole et a fait de notre vie un enfer. Il s'est débrouillé je ne sais comment pour me faire renvoyer de la fac. Et ensuite, il a fait renvoyer ton père de son internat. Il nous était impossible de faire quoi que ce soit à New York. Toutes les portes se sont fermées devant notre nez.
- Quel enfoiré !
- Heureusement pour nous, son pouvoir ne s'étendait pas à toutes les villes américaines alors nous sommes partis et nous nous sommes installés à San Francisco. Ton père a pu trouver une place au « General Hospital » et moi j'ai pu intégrer l'Institut d'Art.
- Tout s'est arrangé finalement ?
- Oui, nous avons seulement dû quitter nos familles et nos amis pour venir se construire une nouvelle vie à San Francisco mais…

Esmée plongea ses yeux dans ceux de mon père.

- Ça valait le coup et je ne regrette rien de mes choix, ni de la vie que j'ai. Et si c'était à refaire, je recommencerais sans hésiter.
- C'est une belle histoire. Pourquoi ne nous l'avoir jamais racontée ?
- Parce que je ne voulais pas interférer sur ta vie ou sur celle de ton frère.
- Emmett ?
- Quand il nous a présenté Irina, je me suis tout de suite méfiée d'elle. Elle ressemblait trait pour trait à toutes ces filles de riches que je rencontrais dans les soirées où Eléazar m'emmenait.
- Mais tu te rends compte que ça aurait pu lui éviter tous les problèmes qu'il a eus !

Mon ton avait légèrement augmenté.

- Non, ton frère était bien trop amoureux à l'époque. Il aurait pensé que je voulais l'éloigner et serait foncé tête baissée dans un mariage qui l'aurait anéanti et alors, il n'aurait peut-être jamais vu ce qu'il a vu le soir où il comptait faire sa demande.
- Et moi pourquoi ne m'en as-tu jamais parlé ?

Elle se leva et s'agenouilla en face de moi. Je baissai la tête, recherchant la chaleur maternelle qui me manquait tant. Elle passa sa main dans mes cheveux.

- Parce que mon grand, bien que tu sois celui que je connais le plus, tu es aussi celui qui me cache le plus tes sentiments. Je ne savais pas. J'ai compris trop tard, beaucoup trop tard.
- Quand as-tu compris ?

Ma voix n'était plus qu'un murmure.

- Quand j'ai vu Bella ce matin-là à la maison, j'ai vu dans tes yeux ce que je ne voyais pas avec Tanya.
- Oh maman !
- Viens là mon chéri

Je me mis à pleurer comme un enfant. Ma mère me prit dans ses bras et me cajola du mieux qu'elle put. Elle caressa mes cheveux dans un mouvement lent et apaisant. Au bout de quelques minutes, je relâchai son étreinte et m'écartai un peu d'elle pour la regarder dans les yeux.

- Dis-moi ce que je dois faire…
- Je ne peux pas Edward. Il faut que tu prennes tes propres décisions.

Elle posa une main sur mon cœur.

- Ecoute-le, il est toujours de bon conseil.

Elle se releva et m'embrassa sur le sommet de la tête. Mon père passa sa main dans mon dos pour me témoigner son soutien. Ils quittèrent ensuite la pièce et je me retrouvai seul avec mes pensées. Que dois-je faire ? Si je décide de ne pas épouser Tanya, que fera-t-elle à l'encontre de Bella ? Elle a peu d'influence mais si Eléazar s'en mêle afin de se venger de mes parents, que se passera-t-il ? A l'époque, il était jeune et avait de l'influence seulement sur New York mais maintenant qu'il possédait les trois quarts des Etats Unis qu'adviendrait-il ?

Trop de questions de bousculaient dans ma tête. Je décidai d'aller dormir. Après tout, la nuit porte conseil. Cette nuit-là, Morphée ne voulut pas m'accueillir. Je ne cessai de me tourner et de me retourner dans les draps. A chaque fois que je fermais les yeux, je voyais le visage de Bella. Celui-ci aurait dû m'apaiser mais, cette nuit, il me torturait. Je m'endormis aux alentours de cinq heures du matin et lorsque le réveil sonna à huit heures, j'eus un mal fou à me lever.

Je sortis de ma chambre, les yeux encore embrumés par le sommeil. Une délicieuse odeur de pancakes m'attira à la cuisine. Ma mère s'activait derrière les fourneaux tandis que mon père lisait le journal en buvant son café. J'avais presque l'impression de me retrouver à la maison lorsque j'étais adolescent en ayant une image telle que celle-ci devant les yeux. Je m'adossai au chambranle de la porte sans rien dire, de peur de briser le rêve. Emmett mit fin à cet instant lorsqu'il me mit une claque dans le dos.

- Aie Emmett !
- Et ben frérot, tu rêvasses ?

Mes parents s'étaient retournés dans notre direction.

- Bonjour mes chéris.

Emmett alla embrasser maman sur une joue et je fis de même, à quelques secondes d'intervalle sur l'autre joue.

- Humm ! Des pancakes aux myrtilles !

Esmée mit une tape sur la main d'Emmett quand il essaya de voler un des pancakes.

- Tu attends ton tour. Celui-ci est pour Edward.

Elle joignit le geste à la parole et me donna l'assiette rempli de pancakes chauds.

- C'est pas juste, c'est toujours lui votre chouchou. Monsieur est un prince dans son appart' et à la maison quand il nous rend visite.
- Et oui ! Le talent mon cher ! Le talent !

Il se mit à bouder dans un coin de la cuisine ce qui nous fit exploser de rire, mes parents et moi. J'appréciais ce moment de détente. Je ne voulais pas penser à la journée qui m'attendait. J'avais décidé d'épouser Tanya. Je craignais trop sa vengeance ou celle de son père sur Bella. Je ne voulais pas que son avenir pâtisse de mes choix. Nous déjeunâmes dans la bonne humeur ce matin-là. Mon frère me taquina comme à son habitude et personne ne parla de la cérémonie à venir.

Après ça, chacun alla se préparer pour la longue journée qui nous attendait. Je craignais un peu les retrouvailles entre mon père et celui de Tanya. Même si je doutais que ce dernier ne se permette un scandale le jour du mariage de sa fille. Tout le beau monde de New York était invité. J'avais essayé d'apposer mon véto à ça mais Tanya avait déclaré que ce mariage était l'événement de l'année.

POV Emmett :

Je n'arrivais pas à croire qu'il allait le faire. J'avoue que j'avais écouté aux portes la veille au soir et j'avais entendu toute l'histoire de mes parents. En un sens, j'étais un peu vexé que ma mère ne me l'ait jamais racontée. Même après ma rupture avec Irina. Un jour, j'aborderais le sujet avec elle…
Aujourd'hui était un jour que je ne voulais pas voir arrivé. Mes parents m'avaient pris à part le matin même avant qu'Edward ne se réveille pour me demander de faire bonne figure. Ils savaient tous deux à quel point Tanya et moi nous détestions. Ils m'avaient expliqué que ce jour était difficile pour Edward et qu'il ne fallait pas le mettre plus dans l'embarras.

Une seule question restait gravée dans ma tête : POURQUOI ? Pourquoi continuait-il dans cette voie après la révélation de mes parents ? Tanya était nocive à la santé et apparemment ce trait de caractère était héréditaire.

Le trajet jusqu'à la cathédrale s'était fait dans le silence le plus total. Une cathédrale ! Il n'y avait bien que Tanya pour voir les choses aussi grandes. Je suis certain que si le pape avait pu les marier, elle l'aurait fait venir d'Italie. Lorsque nous descendîmes de voiture, mon père accompagna Edward dans la salle de préparation du marié. Et il en faut de la préparation pour épouser cette vipère !

Ma mère et moi rejoignîmes l'intérieur de la cathédrale afin de trouver nos places.

- Bonjour Esmée.

Ma mère sursauta et se retourna d'un seul coup à l'entente de cette voix masculine. Je me retournai et dévisageai la personne qui l'avait interpellée. Je n'avais pas besoin de présentations pour savoir que cet homme était le père de Tanya. Autrement dit l'ex-fiancé de ma mère. Ma mère sortit de sa torpeur au bout de quelques longues minutes.

- Bonjour Eléazar.
- Tu as l'air en forme.
- Oui je vais bien, je te remercie.

Ils se fixèrent un bon moment du regard. Je ne savais pas trop ce qui se passait entre eux mais la tension était palpable. Eléazar cligna des yeux et sembla sortir de sa transe. Il tourna sa tête vers moi et me sourit. Un sourire identique à celui de sa fille : machiavélique à souhait !

- Tu ne me présentes pas ?

Je pris les devants et me présentai moi-même au futur beau-père de mon frère.

- Je suis Emmett Cullen.
- Ah oui ! Tanya m'a beaucoup parlé de toi !

Nous nous affrontâmes du regard. Visiblement Tanya n'avait pas tari d'éloges sur mon compte. Au bout de quelques minutes, il fut rejoint par une femme. Celle-ci possédait de longs cheveux blond vénitien. Je supposai alors que c'était la mère de Tanya.

- Je vous présente ma femme Carmen.

Celle-ci hocha la tête dans notre direction et elle glissa quelques mots à l'oreille de son mari.

- Tanya veut me voir quelques minutes.

Je soupirai pensant enfin pouvoir être tranquille avant le début de ce calvaire mais ce n'était pas sans compter sur Eléazar Denali.

- Esmée ? Souhaiterais-tu m'accompagner saluer ta belle fille ?

Je restai bouche bée devant le culot de ce type. Il avait tenté de gâcher la vie de ma mère et voilà que des années plus tard, il jouait le mec mielleux. Ma mère me lança un regard de SOS.

- Je vous accompagne.
- Je ne suis pas sûr que Tanya soit ravie de vous voir jeune homme…
- Ne vous inquiétez pas pour ça. Tanya et moi c'est… comment dire… une grande histoire d'amour…

Constatant que je ne lâcherais pas le morceau, Eléazar me fit un petit signe de tête avec le sourire narquois qui le caractérisait. D'ailleurs, quand il rétrécissait ses yeux et souriait ainsi, on pouvait lui trouver une certaine ressemblance avec un rat.

- Très bien allons-y !

Il prit le bras de ma mère sans lui demander sa permission. Espèce de connard ! Je fulminais de l'intérieur. Je ne devais pas me faire remarquer, surtout aujourd'hui, sinon je n'étais pas sûr qu'Edward me pardonne. Nous marchâmes jusqu'à la salle de préparation de la mariée. Monsieur Denali frappa doucement à la porte et la voix nasillarde de Tanya l'invita à entrer.

Je baissai la tête ne sachant pas si j'avais vraiment envie de voir Cruella dans cette tenue. J'avais bien trop peur que cela me ramène à la réalité. Une réalité où Edward épousait Tanya alors que Bella était malheureuse avec son mari. Je sentis ensuite les doigts de ma mère agripper avec force mon bras. Je relevai la tête et ouvrai grand la bouche de stupéfaction.

Oh Mon Dieu ! Je ne savais pas trop si je devais être mort de rire ou mort de peur. Devant nous se tenait une Tanya dans une espèce de robe immonde. Elle avait largement exagéré sur le nombre de jupons et ressemblait à une atroce et grosse meringue. Elle était maquillée à outrance, très vulgairement avec des couleurs complètement tape à l'œil. Et son chignon contenait tellement de verdure qu'elle aurait pu refleurir tout Central Park sans problème. Elle tenait dans ses mains un bouquet tellement énorme qu'il aurait pu nourrir toute une colonie de vaches en Nouvelle Zélande. Quand Edward disait qu'elle avait tout vu en grand, je voulais à présent bien le croire. J'avais l'impression de me sentir comme Alice au pays des Merveilles lorsqu'elle boit la potion qui la rend toute petite.

Je me mordis tellement l'intérieur des joues pour ne pas rire que je pus sentir le goût du sang dans ma bouche. Je jetai un coup d'œil à ma mère et vit son regard horrifié. J'eus soudain la vision de Bella en mariée me traverser l'esprit. A côté de Tanya, Bella était un ange tout droit descendu du Ciel. A la réflexion, mieux valait ne pas comparer ce qui n'était pas comparable. Le son de la voix d'Eléazar me sortit de ma léthargie.

- N'est-elle pas magnifique ?

Cette fois-ci, je pouffai comme une collégienne devant le prof de ses rêves. Ma mère m'envoya un coup de coude dans les côtes.

- Avec tout le respect que je vous dois Monsieur Denali, ma maman m'a toujours appris que ce n'était pas beau de mentir !
- Espèce de sale insecte ! Qu'est-ce que tu fais ici d'abord ?
- Et bien figure-toi que j'ai reçu un joli carton d'invitation.

Je souris de toutes mes dents et Tanya grimaça. Elle passa devant moi afin d'avancer vers ma mère. Avec le poids de sa robe, de sa coiffure et de son bouquet, elle devait facilement avoisiner les 100 kilos !

- Qu'en pensez-vous Esmée ?

Elle fit un tour sur elle-même et je ne pus m'empêcher d'éclater de rire cette fois.

- Oh toi le gros balourd ça va !

Je calmai mon rire et ma mère me lança un regard mi amusé et mi apeuré. Elle seule, savait de quoi j'étais capable. Une idée me vint soudain à l'esprit. Je m'approchai de Tanya qui attendait toujours les compliments de ma mère et mis ma main sous son bouquet. Ma mère secoua négativement la tête mais c'était beaucoup trop tentant et je ne pus résister davantage. Je poussais le bouquet vers le haut afin que Tanya le reçoive en pleine figure.

- Tiens ! Mange tes fleurs, ça te fera une occupation et vu que tu ressembles déjà à une vache dans cet accoutrement, ça t'ira à merveille !

Ma mère ne put s'empêcher d'étouffer un rire. Et moi, j'étais fier de mon effet. Tanya dégagea sa tête de son bouquet et je m'esclaffai encore plus en voyant une marguerite qui était restée coincée entre ses dents.

- Alors surtout ne change rien Tanya ! On n'a plus qu'à te rebaptiser Huguette !

Elle cracha la fleur de sa bouche et me lança un regard noir de fureur. Sur le fond rouge cramoisi de son visage, c'était à hurler de rire.

- Sors d'ici ! Espèce de crétin sans cervelle !

Je riais tellement que je pouvais sentir les larmes perler au coin de mes yeux.

- Nous allons aller rejoindre nos places Eléazar…

Ma mère avait autant envie que moi de sortir de cette pièce. Satan me lança un regard aussi noir que celui de sa fille. Ma mère ne demanda pas son reste et me prit par le bras alors que je ne pouvais plus m'arrêter de rire. Une fois dehors, ma mère posa ses deux mains sur ses hanches et me dévisagea avec un regard qui se voulait sévère.

- Bah quoi ? Ne me dis pas que tu n'as pas eu envie de rire ?

Ma mère ne répondit rien mais un sourire se dessina sur son visage. Elle finit par éclater de rire. Je la pris par les épaules afin de la serrer contre moi et nous rejoignîmes nos places en riant. Finalement, cette journée commence plutôt bien !




Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire