mercredi 29 décembre 2010

Chapitre 10 : Réveil Difficile

POV Edward :

Après avoir laissé Bella sur la falaise, je rentrai directement à la maison. Pour que je ne change pas d'avis, je devais agir dès maintenant et partir dès ce soir. J'ignorais si je serais encore capable de le faire le lendemain. Peut-être qu'en mettant des milliers de kilomètres entre nous, j'arriverai à l'oublier ! Tu te voiles la face, Edward ! Je me garai en trombe dans l'allée et sortait précipitamment de la voiture. Lorsque j'entrai dans la maison, j'entendis la voix de Tanya au salon. Je me dirigeai donc vers celui-ci et la trouvai en compagnie de mes parents, mon frère, Jasper, Alice et Rosalie.

- Oh Eddychouchou, tu m'as manqué ! Mais où étais-tu donc passé ?
- Je suis allé me balader. Je peux te voir une minute Tanya.
- Bien sûr.

Emmett et Jasper me regardaient de manière perplexe. Mes parents me dévisageaient. Il ne faut pas que tu te dégonfles ! Va jusqu' au bout des choses cette fois ! Rentre chez toi et oublie-la ! Voilà ce que ma voix intérieure ne cessait de me répéter en boucle : « Oublie-la »

Nous nous dirigeâmes vers la cuisine et Tanya commença à passer ses mains autour de mon cou et à m'embrasser la mâchoire. Je me défis de cette étreinte.

- Qu'est-ce qui se passe Edward ? Tu agis bizarrement depuis que je suis ici.
- Ecoute Tanya, je veux qu'on rentre à New York.

Il m'avait fallu une force hors du commun pour me convaincre de ça. Et encore plus pour l'exprimer à haute voix.

- Bien sûr mon amour, nous pouvons réserver des billets pour demain dans la…
- Non ! Ce soir ! Je veux partir ce soir.
- Tu me caches quelque chose ? Pourquoi veux-tu précipiter notre départ ?
- Ce n'est pas ce que tu voulais ? Tu détestes San Francisco. Tu passes ton temps à me le répéter.
- Oui c'est vrai mais cela ne te ressemble pas.

Elle me dévisagea un instant.

- Edward, est-ce que tu veux quitter la ville à cause de cette… fille… que nous avons vue au restaurant ?

Je ne pouvais pas répondre. Repenser à Bella me déchirait le cœur. Elle dut voir dans mon regard que je ne souhaitais pas en discuter.

- Bon très bien, j'appelle l'aéroport pour avoir un vol ce soir.
- Très bien je vais prévenir ma famille.

Je soufflai un bon coup avant de rejoindre ma famille au salon.

- Ah Edward ! Te voilà enfin ! Tu sais que tu nous dois une fière chandelle pour nous être occupé de ta sangsue toute la soirée.
- Emmett !

Ma mère ancra son regard dans le mien.Dieu que ça allait être dur de lui mentir !

- Mon chéri quelque chose ne va pas ? Tu es tout pâle.

Je relevai la tête et aperçus six visages inquiets.

- Tanya et moi rentrons à New York dès ce soir.
- QUOI ? Mais t'es tombé sur la tête ou quoi ?
- Emmett calme-toi !
- Mais papa !
- Emmett !

Je n'avais que très rarement vu mon père hausser le ton avec nous et j'étais surpris de sa réaction. Il s'adressa ensuite à moi.

- Je suppose que, si tu t'en vas, c'est pour une bonne raison et que tu as bien réfléchi.

J'acquiesçai d'un hochement de tête. Je ne pouvais pas le regarder dans les yeux. J'avais bien trop peur d'y voir de la déception.

- Très bien alors si personne ne veut dire ce qu'il pense ici, moi je vais le faire.

Emmett s'approcha de moi tout en serrant ses poings.

- Tu n'es qu'un lâche Edward ! Au premier obstacle tu t'en vas. Si Bella est vraiment la femme que tu aimes, tu dois te battre pour elle.
- Dois-je te rappeler qu'elle en a épousé un autre ?
- Et toi qu'est-ce que tu t'apprêtes à faire ?
- Oui effectivement, je rentre à New York et je vais y épouser Tanya que tu le veuilles ou non.
- Qu'est-ce qui s'est passé ce soir pour que tu prennes une décision aussi radicale ?

Mon frère était perspicace. Il me connaissait comme mon ombre et savait que j'avais pris ma décision sur le coup d'une impulsion.

- Rien, absolument rien de plus que ce qui s'est déjà passé entre elle et moi.
- Alors tu n'as trouvé que cette solution pour parer au problème : la fuite.
- Et que veux-tu que je fasse de plus ? Elle a fait un choix.
- Tu vas la laisser avec ce monstre ?
- Si elle l'a épousé, c'est qu'il doit y avoir du bon en lui.
- Mais bon sang réagis Edward !

Emmett et moi ne nous étions jamais véritablement disputés. Bien sûr, nous passions notre temps à nous chamailler mais rien de comparable à ce qui se jouait en ce moment même. Je pouvais le voir serrer les poings de toutes ses forces.

- Emmett, ne te mêle pas de ça.
- Alors il faut te laisser gâcher ta vie sans rien dire c'est ça ?
- Je ne gâche pas ma vie !
- Oh si tu la gâches et tu le fais en beauté en plus ! Ecoute Edward, si tu t'en vas ce soir, oublie que tu as un frère.

Il sortit de la pièce et de la maison sans même me laisser le temps de répliquer. Je restai interdit face à ses dernières paroles. Cette fois j'en étais certain, ce séjour ici ne m'avait apporté que malheur et déception. Je tournai mon regard vers mes parents. Ma mère était blottie dans les bras de mon père et pleurait. Je faisais exactement ce que je m'étais promis de ne jamais faire : blesser les gens que j'aimais. Sans un mot, je quittai la pièce et montai dans ma chambre préparer mon sac. Il fallait que je tire un trait sur tout ce qu'il s'était passé pendant cette semaine. Il fallait que je me persuade que mon départ était la meilleure chose à faire.

POV Emmett :

J'étais heureux comme un pape. Mes parents m'avaient appris qu'Edward viendrait quelques jours avant son mariage avec l'autre espèce de quiche. Pire qu'un gamin, le matin de Noël ! Cela faisait maintenant des années que j'étais seul à San Francisco. Depuis qu'Edward et Jasper étaient partis faire leurs études à New York. Mon petit frère avait toujours eu cette passion pour la musique. Je n'avais donc pas été étonné quand il avait appris à mes parents qu'il souhaitait intégrer Julliard. Quant à Jasper, il poursuivait brillamment ses études de psychologie. En ce qui me concerne, j'étais resté ici car j'avais un poste d'éducateur sportif pour enfants que j'adorais.

La première fois qu'Edward nous avait présenté Tanya, j'avais vu mon père devenir très pâle. J'avais appris par ma mère plus tard qu'il avait eu des différents dans le passé avec le père de Tanya. Elle avait toujours refusé de m'en dire plus. Et ce n'était pas faute d'avoir insisté lourdement. J'avais la sensation bizarre qu'un lourd secret entourait mes parents et le futur beau père d'Edward.

Edward et Tanya s'étaient rencontrés lors d'une soirée de charité à New York. Il y avait été embauché pour jouer quelques morceaux. Et cette sangsue avait jeté son dévolu sur mon frère. Au début, ils n'avaient été qu'amis mais bien vite, il s'était laissé charmer par ses formes et au fil du temps, elle avait fini par l'embobiner et le convaincre de l'épouser. Mais moi, je ne m'étais pas laissé duper par son manège. Je connaissais les femmes telles que Tanya comme ma poche. Je m'étais brûlé les ailes avec une fille du même acabit que cette peste.

A mon entrée à l'université, j'avais fait la connaissance de la plus belle fille que je n'avais jamais vue. Enfin c'est ce que je croyais avant de rencontrer Rosalie ! C'était une petite brune pétillante aux yeux noirs ébène. J'en étais tombé fou amoureux au premier regard. Irina était issue d'une famille très riche. Son père dirigeait la plus grande entreprise de construction de San Francisco. Autant dire qu'elle avait toujours été pourrie gâtée. A l'époque, elle disait se sentir bien avec moi car elle n'était pas obligée de jouer le rôle de la parfaite petite fille riche. Au bout d'un an, nous avions emménagé ensemble. Nous avions passé deux années de passion intense. Un jour, je m'étais décidé à lui demander sa main. J'avais été chez le bijoutier et avait acheté la plus belle bague du magasin. Autant dire que je m'étais ruiné pour ce bijou. Ce jour-là, j'avais décidé de lui faire la surprise de rentrer plus tôt à la maison. J'avais cru devenir fou lorsque je l'avais retrouvée dans notre chambre, dans notre lit avec deux types.

Ce jour-là, mon cœur s'était déchiré en des milliers de morceaux. Elle m'avait alors avoué que pour elle, je n'avais été qu'un misérable passe temps. Que jamais elle n'épouserait quelqu'un qui ne soit pas capable de lui assurer le même standing de vie que son père. Que je n'étais qu'un minable sans avenir. Pendant longtemps, j'avais cru à toutes ses paroles. Je m'étais alors mis à boire et à faire n'importe quoi. J'étais tombé dans une spirale infernale. Heureusement, mes parents m'avaient aidé. J'étais retourné vivre à la maison et j'avais suivi une cure de désintoxication. J'avais rattrapé l'année que j'avais perdue à l'université et j'avais obtenu mon diplôme avec mention.

Je ne voulais pas qu'Edward ait à subir la même chose que moi avec Tanya. Voilà pourquoi j'avais cette fille en grippe depuis le début. En plus, je ne voyais vraiment pas ce qu'il pouvait lui trouver. Son cerveau devait être plus petit qu'un pois chiche. Elle était le stéréotype même de la blonde. Et puis physiquement, ce n'était pas du tout son type de femme. Il n'avait jamais apprécié le type bimbo. D'autant que je me souvienne, toutes les pom pom girls du lycée avaient essayé de le séduire en vain.

Quand nous avions rencontré Bella, au plus profond de moi, j'avais senti que c'était elle qui était faite pour lui. Le destin m'avait donné raison. Alors pourquoi ces deux idiots s'entêtent-ils dans la voie du malheur ? Bien sûr, Edward avait pris une grosse claque quand Bella avait décidé d'épouser son fiancé mais après ce que ce dernier lui avait fait lors de leur nuit de noces, je n'avais plus aucun doute sur la fiabilité de leur couple. Le fait qu'il veuille partir ce soir anéantissait tout espoir qu'il renonce à son mariage. Evidemment, je lui en voulais de partir sans se battre davantage pour l'amour de sa vie mais je m'en voulais aussi de ne pas réussir à lui faire comprendre dans quoi il mettrait les pieds s'il s'entêtait dans ce mariage.

Après être sorti précipitamment, j'avais besoin de mettre un peu de distance entre la maison et moi. Je pris le chemin d'un endroit que j'affectionnais tout particulièrement. Après ma rupture avec Irina, j'avais passé des heures sur cette plage au pied de la grande falaise. Ca me permettait de faire le vide dans ma tête et de réfléchir objectivement. Je me garai près des rochers et inspirai l'air marin à pleins poumons. L'orage s'était tari et la pluie avait cessé. Je m'approchai du bord de l'eau et m'assis sur le sable. Je repensai à ce que j'avais dit à Edward avant de partir. Je m'en voulais. Pourquoi ne veut-il rien comprendre ? Par amour, on doit être capable de soulever des montagnes.

Je regardai alors l'horizon et vis au loin quelque chose qui flottait. Je me levai et m'approchai un peu plus près. C'est alors que je vis, horrifié, qu'il s'agissait d'un corps. Je plongeai et nageai jusqu'à ce dernier. Je reconnus immédiatement Bella. Je passai mon bras au dessus de sa poitrine afin de la ramener sur la plage. Je fis attention à maintenir sa tête hors de l'eau. Heureusement que les cours de secourisme étaient obligatoires au lycée ! Lorsque j'eus pied, je pris son petit corps frêle dans mes bras et la ramenai sur le sable. J'écoutai son cœur et je paniquai lorsque je n'entendis rien.

- Bella, Bella réponds-moi bon sang !

Je relevai alors sa tête en arrière et lui prodiguai un massage cardiaque. Je luis fis du bouche à bouche et au bout de quelques minutes, elle recracha de l'eau. Malgré cela, elle était toujours inanimée. Je la transportai jusqu'à ma voiture et l'installai à l'arrière. Je passai derrière le volant et démarrai en trombe.
Pendant le trajet qui me menait à l'hôpital, j'appelai mon père afin qu'il m'y rejoigne. Je lui expliquai brièvement la situation et il m'apprit qu'Edward était déjà parti pour l'aéroport. Ma mère les y avait accompagnés. Je raccrochai et accélérai pour arriver à l'hôpital au plus vite. Lorsque j'arrivai devant la porte des urgences, je vis la voiture de mon père se garer au même moment. J'extirpai Bella de la voiture et pénétrai dans les urgences, mon père sur les talons. Je la posai sur un brancard où elle fut tout de suite prise en charge.

- Que s'est-il passé Emmett ?
- Je ne sais pas, j'étais allé à la plage au bord de la grande falaise pour me calmer et je l'ai vue qui flottait dans l'eau. Je lui ai appliqué les premiers soins.
- Est-ce que son cœur battait ?
- Pas quand je l'ai sortie de l'eau, je lui ai fait un massage cardiaque et du bouche à bouche.
- Elle a recraché de l'eau ?
- Oui mais elle n'a pas repris connaissance.
- Très bien, je m'en occupe. Essaie de joindre Edward !
- J'appelle Rose pour qu'elle prévienne le père de Bella… Papa ? Ca va aller ?
- Tu lui as certainement sauvé la vie.

Il m'ébouriffa les cheveux et me sourit avant de disparaitre dans une salle de soins. Je soupirai de soulagement et me dirigeai vers la sortie pour récupérer mon portable et appeler Rosalie. Une fois fait, j'essayai d'appeler le portable Edward. Je tombai directement sur sa messagerie. Je tentai alors le portable de ma mère.

- Allo mon chéri, est-ce que ça va ?
- Ca va maman ! Est-ce qu'Edward est près de toi ?

Un silence de plomb s'abattit au bout du fil.

- Maman ?
- Je suis désolée Emmett, mais Edward vient juste d'embarquer pour son vol.
- Très bien. Merci Maman.
- Ne lui en veux pas mon chéri.
- Je ne lui en veux pas, j'ai juste peur.
- Je sais moi aussi. Tu es à la maison ?
- Non, je suis à l'hôpital. Papa est ici aussi. Ne t'inquiète pas je vais bien.
- Que s'est-il passé ?
- Viens-nous y rejoindre, je t'expliquerai. Je dois attendre l'arrivée de Rose.
- Très bien j'arrive tout de suite. Je t'aime mon chéri.
- Je t'aime aussi Maman.

POV Rosalie :

Ce séjour virait littéralement au cauchemar. J'étais tellement persuadée en venant retrouver Bella que j'arriverais à lui faire ouvrir les yeux et à rompre ce mariage qui de toute façon était sans avenir. J'avais tort. Je connaissais Bella depuis ma plus tendre enfance. Charlie et elle avaient toujours été mon échappatoire lorsque mes parents se disputaient. Leur mariage n'était qu'une mascarade, une vulgaire histoire de convenances. Comment cela peut-il encore exister à l'époque où l'on vit ? C'est un mystère pour moi. Toujours est-il que Noël et Thanksgiving n'étaient rythmés que par des cris et des larmes. Je ne voulais pas que cela arrive à Bella. Bien sûr, elle n'épousait pas Jake par convenance, mais une chose était certaine, elle n'en était pas amoureuse. J'avais eu beau essayer maintes et maintes fois de lui faire comprendre, rien n'y avait fait.

Alors quand Edward a débarqué dans sa vie, j'y croyais. Alice et moi étions persuadées qu'il arriverait à lui faire ouvrir les yeux. Depuis leur rencontre, je redécouvrais notre Bella. Malgré son dilemme permanent avec Jake et Edward, quand elle parlait de ce dernier, elle avait les yeux qui pétillaient de bonheur. Je ne l'avais jamais vue aussi heureuse. Elle s'était lâchée lors de notre petite soirée jeu et cela nous faisait un plaisir immense. Son visage rayonnait lorsqu'elle l'apercevait et son sourire était vraiment sincère. Bref notre Bella revivait enfin…

La vie n'avait pas toujours été tendre avec elle. Elle avait beaucoup souffert du divorce de ses parents et elle avait hésité longuement avant d'accepter la demande en mariage de Jacob. A l'époque, j'avais bien essayé de l'en dissuader mais elle était aussi têtue qu'une mule. Quand elle prenait une décision, autant essayer de parler à un mur que de la faire changer d'avis. Voilà pourquoi je n'étais qu'à demi étonnée qu'elle n'ait pas renoncé à épouser Jake.

Ce mariage avait remué bien des souvenirs en moi. J'en voulais aussi à Bella de ne pas se souvenir à quel point cette histoire pouvait me faire mal. Lorsque j'avais 16 ans, j'avais rencontré un jeune homme. Il s'appelait Royce King III. Ses parents possédaient tout Seattle : magasin de vêtements, restaurants, hôtels… Et ils avaient envoyé leur fils à la conquête de San Francisco. Selon mes parents, c'était un très bon parti et ils considéraient que je n'aurais jamais manqué de rien avec lui. Ils avaient omis une chose essentielle : l'amour.

Au début, je me sentais bien avec Royce. Bien vite, je m'étais laissée charmer par cet homme. Il fallait reconnaître que c'était agréable de se faire traiter comme une princesse. Il m'offrait tout ce que je désirais, m'emmenait dans les endroits les plus chics et les plus branchés de San Francisco. Nous nous étions mariés très peu de temps après notre rencontre. Malgré le fait que nous rencontrions toujours beaucoup de monde et que nous étions très entourés, je ne pouvais m'empêcher de me sentir atrocement seule. Je ne voyais plus ni Alice ni Bella car Royce considéraient qu'elles n'étaient pas assez bien pour moi. Il avait réussi à me mettre dans le crâne qu'elles ne s'intéressaient à moi que pour l'argent et le prestige que je pouvais leur apporter. Et moi, comme une idiote, je l'avais écouté. J'avais bousillé des années d'amitié pour des mensonges.

Puis la situation s'était dégradée. Il commençait à devenir violent et vulgaire avec moi. Il me traitait comme sa chose. Il m'exhibait comme un objet dont on est fier car c'est une pièce de collection. Je n'avais même plus la sensation d'être un être humain. Lorsque je voulus le quitter, il me fit comprendre à sa manière qu'on ne rompait pas avec Royce King. Il me frappa pendant des mois et des mois. Je n'avais pas le droit de sortir car mon visage était tuméfié, violet à cause des marques. Il disposait de mon corps quand bon lui semblait. Il rentrait complètement saoul la nuit et n'hésitait pas à me réveiller pour me violer. Il m'avait cloitrée dans une cage dorée, dans mon enfer personnel. Je n'avais ni le droit de sortir, ni celui de téléphoner. Il avait même embauché deux gardes afin que personne ne m'approche de près ou de loin. Mon quotidien était devenu un vrai supplice. Et encore aujourd'hui, je me demande comment je résistais à l'envie de mettre fin à mes jours. Au fond, je n'étais qu'une petite fille qui espérait que son prince charmant arriverait sur son cheval blanc pour la délivrer des griffes de l'affreux monstre. Espérer un jour rencontrer le véritable amour était la raison qui me maintenait en vie.

Un jour, alors que Royce était de très bonne humeur, il proposa de m'emmener faire les boutiques. Bien que cette sortie avec lui me révulsait totalement, c'était pour moi l'occasion de m'échapper de ma prison pendant quelques heures. A un moment, son attention fut détournée par des amis qui étaient venus le saluer. Je sus immédiatement que c'était l'instant ou jamais. Je pris mes jambes à mon cou et courus aussi vite que possible. Je ne voulais pas regarder derrière moi, j'avais bien trop peur de le trouver dans mon dos. L'adrénaline faisait que je ne me sentais pas fatiguée. Si j'avais dû traverser tout San Francisco pour lui échapper, je l'aurais fait. Mes pas me guidèrent tout naturellement chez ma meilleure amie. Je me souviens qu'en arrivant chez Bella, je m'étais effondrée dans ses bras. Je ne parvenais plus à m'arrêter de pleurer. Toutes les larmes que j'avais contenues depuis des mois faisaient enfin surface.

Raconter cette histoire fut comme me décharger d'un poids immense. Bella était restée silencieuse pendant tout mon récit. Elle avait ensuite fondu en larmes et nous nous étions blotties dans les bras l'une de l'autre pendant des heures sans bouger. Après une très longue procédure, j'obtenais mon divorce et Charlie mettait Royce derrière les barreaux pour de longues années.

Je mis des mois à me reconstruire mais je garderai toujours une cicatrice indélébile au cœur. Je ne voulais plus jamais me laisser marcher sur les pieds par un homme. Je construisis alors cette carapace de reine des glaces pour me protéger. Je ne laissais plus les garçons atteindre mon cœur. Je les utilisais pour le sexe et les jetais ensuite. Alice me reprochait souvent mon comportement mais je ne pouvais pas m'en empêcher. Je ne voulais plus jamais avoir mal. Je ne voulais plus me laisser dominer par un homme. Les blessures intérieures sont celles qu'on voit le moins mais qui font le plus mal. 

Voilà pourquoi, j'en voulais à Bella de se conduire de la sorte. Elle comme moi savions que ce mariage n'était qu'une mascarade. Bella était toujours restée une petite fille apeurée pour ce qui concernait les hommes. Et pourtant, ce n'était pas les prétendants qui manquaient à l'appel. Jacob avait su la séduire et elle n'avait pas cherché plus loin. Cependant, je savais que Bella était de celles qui croient au grand amour. Alice et moi la taquinions bien assez sur ses lectures. C'était une vraie fleur bleue. Lorsque nous étions petites, nous l'avions surnommée China Doll (1) ! Elle était si douce, si tendre, si fragile que nous avions peur de la casser. Malgré le fait que nous ayons grandi, Bells était restée cette même petite fille.

Le fait qu'elle refuse d'ouvrir ses yeux face à l'amour que lui portait Edward me rendait folle furieuse. Comment peut-on tourner le dos au grand amour aussi facilement ? J'avais voulu me venger ce soir mais le regard de tueuse qu'Alice m'avait lancé en revenant des toilettes, et le chagrin que j'avais pu voir dans les yeux de Bella m'avaient dissuadée de continuer. Elle était partie précipitamment avec Jacob et un mauvais pressentiment m'avait habité tout le reste de la soirée. Et je n'avais pas complètement tort de penser que quelque chose s'était passé entre Edward et Bella. Lorsque nous avions raccompagné Tanya chez les parents d'Emmett et Edward, ce dernier était arrivé comme une furie. Nous fûmes tous très surpris quand il nous apprit qu'il rentrait le soir même à New York.

Les parents des garçons semblaient bouleversés par la nouvelle bien qu'ils aient tenté de le cacher. La réaction d'Emmett me surprenait beaucoup. Il était véritablement en colère contre son frère. Ma rencontre avec Emmett m'avait beaucoup décontenancée. Après mon divorce avec Royce, je m'étais promise de ne jamais retomber dans les filets d'un homme. Et pourtant ce soir-là, j'avais été pire qu'une adolescente en plein émoi. Je ne comprenais pas trop ce qui m'arrivait. Mon cœur battait la chamade à chaque fois qu'il s'approchait de moi et j'avais l'impression d'avoir des dizaines de papillons dans le ventre lorsqu'il me touchait. Avec lui, je ne jouais pas un rôle, je redevenais la Rosalie que j'avais été avant ma sombre histoire. Lors de nos moments à deux, je redoublais de tendresse à son égard et il faisait de même de son côté. Ses caresses étaient pour moi un vrai délice. J'avais vraiment l'impression que ma peau avait besoin de sa peau. Comme d'un manque enfin comblé, j'en avais des frissons.

Lorsque nous étions au lycée, je me rappelle que Bella nous avait tenu un grand discours à Alice et moi, sur les âmes sœurs. A l'époque, je m'étais moquée d'elle et de son trop plein de romantisme mais aujourd'hui, je me demandais si ce n'était pas elle qui avait raison. Est-ce possible d'avoir sur cette Terre une âme qui soit faite uniquement pour la nôtre ? Toujours est-il que je me sentais bien à l'intérieur de ses bras et je ne voulais pas renoncer à ce bonheur à cause de mon passé. Je voulais prendre mon destin en main. Tout le contraire de notre Bella.

Je me demandais ce qu'il avait bien pu se passer entre eux ce soir pour qu'Edward décide de partir aussi vite. Il semblait également déterminé à épouser la dinde qui lui servait de fiancée. Au début, j'avais vraiment essayé de m'intéresser à ce qu'elle disait mais j'avais vite décroché. C'était Emmett qui avait raison. Cette fille avait un vrai pois chiche à la place du cerveau. On pouvait se demander si elle n'était pas parente avec Paris Hilton. Et je comprenais que mon loulou soit aussi cinglant avec elle.

Quand Emmett était sorti en trombe, je savais que cela ne servirait à rien de lui courir après. Il avait besoin de calmer ses esprits. Il regretterait bien assez vite ce qu'il avait dit à Edward. Après son départ, ce dernier n'avait plus dit un mot. Il était monté préparer ses affaires et était redescendu quelques minutes plus tard. Sa mère avait proposé de les emmener à l'aéroport. Alice, Jasper et moi l'avions salué et nous avions quitté la villa peu après leur départ. Alice m'avait ensuite déposée à la maison. Mes parents avaient encore décidé ce soir de la transformer en champ de bataille. J'étais montée sans un mot à leur égard et j'avais calé le volume de mon Ipod à fond pour ne pas entendre les cris.

Au bout de quelques minutes, je sentis mon portable vibrer dans ma poche. Je m'en saisis et esquissai un sourire en voyant l'appelant. J'enlevai mes écouteurs et décrochai rapidement.

- Est-ce que ça va mieux mon Nounours ?
- Rosalie…
- Que se passe-t-il ? Ca n'a pas l'air d'aller ?
- Non ça ne va pas. Il faut que tu me rejoignes à l'hôpital tout de suite.
- A l'hôpital ? Mais que s'est-il passé ?
- Viens me rejoindre, je t'expliquerai une fois sur place.
- Emmett Cullen, dis-moi ce qui se passe immédiatement.

Mon ton était froid. Je ne supportais pas que l'on me cache des choses. Un silence pesant s'abattit au bout du fil.

- Emmett ?
- Ecoute Rose, c'est Bella…
- Bella ? Quoi Bella ? Explique-toi bon sang…
- Elle a sauté du haut d'une falaise.

Je lâchai le téléphone et je sentis les larmes se répandre sur mes joues. Bella, mais qu'as-tu fait ? Comment as-tu pu en arriver là? Et moi, au lieu de la soutenir, je n'avais pas cessé de lui faire des reproches… La voix d'Emmett au bout du fil me sortit de ma transe

- Rose… Rosalie… Réponds-moi…

Je me saisis du combiné et le portai de nouveau à l'oreille.

- Oui je… je suis là…
- Ecoute, j'ai appelé mon père et c'est lui qui l'a prise en charge à son arrivée aux urgences. Il m'a dit qu'elle était hors de danger. D'après lui, je suis arrivé à temps !
- Mon Dieu Bella ! Comment j'ai fait pour ne rien voir ?
- Ce n'est pas de ta faute ma belle ! Mais elle a besoin de toi à ses côtés…
- Jamais je n'aurai pensé…
- Je sais, moi non plus… Peux-tu prévenir son père ? J'ignore son numéro de téléphone.
- Oui je le fais tout de suite.
- Je ne sais pas s'il faut lui dire qu'elle…
- Je ne sais pas. Je ne sais plus.
- Ecoute ne donne pas de détails. Dis-lui tout simplement qu'elle est à l'hôpital. J'essaierai de voir mon père avant qu'il n'arrive pour voir ce qu'il en pense.
- Très bien.
- Je vais contacter Jazz pour qu'il passe te prendre avec Alice. Je ne veux pas que tu conduises dans cet état.
- D'accord. J'appelle Charlie et je les attends.
- Je t'embrasse. A tout à l'heure.
- Oui moi aussi. A tout de suite.

Je raccrochai machinalement. J'avais du mal à sortir de l'état catatonique dans lequel j'avais été plongée. Je pris tout de même mon courage à deux mains et appelai Charlie. Celui-ci paniqua complètement et il raccrocha avant même que je n'ai eu le temps de lui dire qu'elle était sortie d'affaire. Ne sachant pas ce qu'il s'était passé, j'ignorais si je devais prévenir Jake. Peut-être était-ce de sa faute ? L'avait-il violenté de nouveau ? Je ne voulais pas penser à cela maintenant. Tout ce que je désirais à cet instant, c'était de savoir si ma meilleure amie allait bien. Un coup de klaxon me ramena à la réalité. Je dévalai les escaliers et sortis en trombe. Je courus vers la voiture. Alice en sortit les yeux rouges et nous nous serrâmes dans les bras l'une de l'autre. A cette heure-ci, elle devait probablement se sentir aussi coupable que moi. Nous remontâmes rapidement dans l'habitacle et Jasper démarra.

Le trajet se fit dans le silence le plus total. Seuls les sanglots d'Alice et les miens venaient le briser. Quand nous arrivâmes sur le parking, nous descendîmes rapidement de la voiture et nous nous dirigeâmes en courant vers les portes automatiques. Je cherchai Emmett du regard et ne tardai pas l'apercevoir. Lorsqu' il me vit, il ouvrit grand ses bras. Je vins m'y blottir et éclatai en larmes.

- Comment va-t-elle ?
- Son état s'est stabilisé, elle est hors de danger. Elle a juste quelques contusions et un bras cassé. Ils lui ont donné un tranquillisant afin qu'elle se repose cette nuit.
- Elle est réveillée ?
- Non mais le scanner n'a montré aucun problème. Mon père m'a dit que lorsque le corps subissait un choc comme celui-ci, l'esprit se mettait en repos de lui-même. Mais il n'y a rien d'alarmant.
- J'ai eu tellement peur.
- Moi aussi.
- Comment l'as-tu retrouvée ?
- C'était un pur hasard. Je suis allé me calmer sur la plage près de la grande falaise, à côté de la Marina et je l'ai aperçue dans l'eau. Au début, j'ignorais que c'était elle. Et puis, je l'ai sortie de l'eau et j'ai fait les premiers gestes de secours pour la ranimer. Ensuite, je l'ai amenée à l'hôpital et j'ai appelé mon père.
- Tu es mon héros.

Il me serra dans une étreinte d'ours qui eut le don de me calmer. Au bout de quelques minutes, je relevai la tête et aperçus Charlie au loin qui discutait avec le docteur Cullen.

- Qu'avez-vous prévu de dire à Charlie ?
- Mon père préfère attendre que Bella se réveille pour savoir ce qu'elle veut lui dire. Il va juste lui dire que je l'ai sortie de l'eau et qu'il présume qu'elle a glissé de la falaise.
- Remarque, vu la maladresse maladive qui la caractérise, ça pourrait passer…

Nous esquissâmes un sourire. Il ne connaissait Bella que depuis peu mais il avait tout de suite remarqué son évidente maladresse. Après notre journée à la plage, il m'avait confié qu'il pensait sérieusement à lui offrir un équipement complet de joueur de hockey.

- Et Edward ?
- Quand j'ai appelé ma mère, il était déjà parti. Il ne perd rien pour attendre. Il s'est sûrement passé quelque chose pour que Bella en arrive à de telles extrémités. Je ne la connais pas aussi bien que toi mais elle ne donne pas l'impression d'être une femme qui baisse les bras aussi facilement.
- Tu sais, Bella est quelqu'un de très fragile malgré les apparences.
- Oui mais je suis persuadé qu'il doit y avoir un déclencheur.
- Et si c'était Jacob ?
- Si jamais cet enfoiré l'a encore brutalisée, je jure de l'expédier en enfer.

Nous vîmes arriver Esmée. Cette dernière nous serra dans ses bras.

- Est-ce que ça va mon chéri ?
- Oui maman tout va bien.

Je n'étais pas habituée à voir quelqu'un d'aussi maternel que cette femme. Elle aimait ses enfants plus que sa vie et le leur montrait à chaque instant. Elle m'avait accueillie à bras ouverts lorsqu'Emmett m'avait présentée. Elle m'avait montré plus d'affection en deux jours que ma propre mère en 20 ans.

Je vis ensuite les portes automatiques s'ouvrir sur Jacob. Il alla directement à la rencontre de Charlie. J'échangeai un regard avec Emmett. Il haussa les épaules pour me signifier qu'il ignorait qui l'avait appelé. Il échangea quelques mots avec Charlie, puis avec Carlisle. Ils partirent ensuite tous trois vers ce que je supposais être la chambre de Bella. J'étais contrariée que ce mufle ait la possibilité de la voir avant Alice et moi, simplement parce qu'ils étaient mariés. Carlisle revint ensuite vers nous et enlaça sa femme.

- Vous pouvez rentrer. Bella ne pourra recevoir de visites que demain matin. J'ai autorisé le Chef Swan et Monsieur Black à rester auprès d'elle cette nuit.

Je fulminais littéralement et je devais très certainement broyer la main d'Emmett. Dire que l'on ignorait totalement si Jake avait quelque chose à voir avec cette histoire…

Le lendemain matin, nous fûmes à l'hôpital aux aurores. Je savais que les visites n'étaient autorisées qu'à partir de neuf heures mais j'avais eu une nuit très agitée. A chaque fois que je fermais les yeux, je voyais Bella se jeter du haut de cette falaise. Au vue des cernes qu'Alice arborait, j'en conclus qu'elle devait avoir passé une aussi mauvaise nuit que moi.

Nous aperçûmes le docteur Cullen au loin. Emmett lâcha ma main et se dirigea vers son père. Ils échangèrent quelques mots et celui-ci leva la tête et nous sourit. Il fit un signe d'accord à Emmett et partit en direction de ce que je devinais être son bureau. Mon nounours revint vers nous tout sourire.

- Bon les filles, elle ne s'est pas encore réveillée mais papa vous autorise à aller la voir dès maintenant.

Je le serrai dans mes bras.

- Vous ne venez pas avec nous ?
- Non, mon père pense que nous serions trop nombreux mais embrassez-la pour nous.
- Merci mon Nounours.
- C'est la chambre 205.

Je l'embrassai rapidement et saisis la main d'Alice. Je nous dirigeai vers la chambre de Bella et frappai discrètement. N'obtenant aucune réponse, nous entrâmes à pas de loup. Charlie et Jacob dormaient chacun sur un fauteuil, de part et d'autre du lit de Bella. Nous nous approchâmes doucement. Charlie et Jacob se réveillèrent en même temps…

- Pardon Charlie, nous ne voulions pas vous réveiller.
- Ce n'est pas grave Alice. Bonjour Rosalie.
- Bonjour Charlie. Comment va-t-elle ?
- Toujours pareil, elle ne s'est pas réveillée de la nuit mais le docteur Cullen m'a dit que c'était normal vu la dose de tranquillisant qu'il lui avait administrée.

Lorsque nous nous retournâmes vers Bella, Jacob était assis sur le lit. Il avait pris sa main et il dessinait de petits cercles sur sa paume. A le voir ainsi, on n'imaginait pas ce qu'il s'était passé durant leur nuit de noce.
Soudain, elle bougea quelque peu.

- Bella, Bella chérie je suis là.

La voix de Jacob était pleine d'espoir.

- Humm… Ed… Edward…

(1) Poupée de porcelaine



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